Sous la plume d'un militant d'Humanité
Livres et publicationsOCTOBRE 2018
Charles Silvestre, pour qui « l’Humanité est une embarcation où des rameurs résistent au naufrage programmé de la presse d’idées », a été des dizaines d’années un des rédacteurs de ce quotidien fondé par Jean Jaurès, à qui il a d’ailleurs consacré plusieurs ouvrages remarqués. Ici, dans Fils d’Humanité, le regard tourné vers un parcours qu’il revendique engagé, il témoigne avec vigueur.
Enfant du Midi, Charles débute dans le métier à La Marseillaise du Vaucluse et, en 1961, le voilà, « un peu par hasard », au fameux Centre de formation des journalistes (CFJ) de la rue du Louvre, à Paris. Son engagement communiste se renforce. Et puis c’est le grand bain dans la rédaction du journal, alors installé rue du Faubourg-Poissonnière.
Il a 30 ans quand, envoyé spécial de l’Humanité, il écrit sur les deux mois de grève dans les chantiers navals de Saint-Nazaire et dans les usines de Sud Aviation. C’est ensuite Besançon et la Rhodiacéta, Longwy et les hauts-fourneaux… des explosions sociales fortes, lourdes de sens, qui préfigurent les mouvements multiples de 1968. Mais personne n’en sait encore rien. Charles Silvestre ne développe pas toujours, il faudrait dix fois plus de pages, mais il n’enjolive pas non plus, quand il regrette par exemple, que « l’Humanité passe à côté de l’éclat étudiant, en 1968 à Nanterre ». Ce regard, parfois critique, un brin ironique, mais toujours fidèle à ses idées, se porte ensuite sur la période du programme commun de gouvernement, la fin de l’URSS, la perte d’influence du PCF, etc.
Au final, ce petit ouvrage foisonnant illustré par le dessinateur Edmond Baudoin, témoignage d’un journaliste qui façonna aussi la toujours active association des Amis de l’Humanité, n’est pas un rassemblement de souvenirs, mais bien davantage l’écho de la mémoire lucide d’un militant d’Humanité.
Fils d'Humanité, de Charles Silvestre (Le Croquant, 208 pages, 12 euros).
Gérald Rossi